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Confirmation du samedi 10 octobre 2020


Homélie de Mgr Laurent DOGNIN

 

10 octobre 2020

Confirmation Saint-Tugdual – Douarnenez – Douarnenez (29)

Ga 3, 22-29 ; Ps 104 ; Lc 11, 27-28

 

 

Chers Amis,

 

Au moment de célébrer la Confirmation, je trouve qu’il est intéressant de nous laisser interpeller par ce passage d'Évangile. Cela nous fait comprendre que la Confirmation, qui est vraiment un don de Dieu, n'est pas un acte superficiel ou un accessoire qui viendrait en guise de complément du Baptême mais qu'il touche à un aspect absolument vital et essentiel de notre existence.

 

Ce que nous avons entendu dans l'Évangile, c'est une parabole sur le Royaume de Dieu. Jésus dit : « le Royaume de Dieu est comparable à … ». Dans l’Évangile, nous trouvons environ une dizaine de parabole sur le Royaume de Dieu car il n’est pas si facile de comprendre ce qu'est le Royaume de Dieu. C’est pourquoi, Jésus nous parle en paraboles afin d’essayer de nous le faire comprendre. D’après ce que Jésus nous dit, le Royaume de Dieu n’est évidemment pas un Royaume comme un autre ! Il ne s’agit pas d’une aire géographique, il s’agit néanmoins d’un peuple. Un peuple sans frontières qui traverse les siècles. Le Royaume de Dieu se construit de siècle en siècle et la seule chose qui va en unir les membres, c'est leur foi en Dieu Trinité, c'est-à-dire en Dieu notre Père, en Jésus-Christ son fils et en l'Esprit Saint, cet Esprit Saint que vous allez recevoir en plénitude dans le sacrement de la Confirmation

 

Le Royaume de Dieu, c'est Dieu qui règne dans les cœurs de ceux qui l'accueillent et qui font sa volonté. Personne n'est obligé d'y consentir, personne n'est obligé de répondre, mais nous sommes tous invités, comme cette belle image des Noces de son fils. Le roi, c'est Dieu le Père, le fils c’est Jésus et les Noces correspondent à ce que nous appelons l’Avènement glorieux du Christ à la fin des temps, où nous serons tous réunis avec Lui pour toujours.

 

On retrouve cette belle image du prophète Isaïe dans la première lecture, où il nous dit que ce sera un rassemblement de tous les peuples (pas seulement quelques-uns mais bien tous les peuples), que nous serons réunis dans une même fête, que la mort aura disparu et que Dieu effacera l'humiliation de son peuple, c'est-à-dire que toute injustice, tout mal auront disparu.

 

Cette vision, qui est une vision messianique correspondant à la fin des temps, nous fait entrevoir ce que sera l'aboutissement de l'humanité. Elle peut nous paraître un peu lointaine à première vue, mais c'est maintenant qu'elle se construit. « Le Royaume de Dieu est au milieu de vous » dit Jésus (Lc 17, 21). Nous sommes tous invités maintenant et personne ne peut dire que cela ne le concerne pas. Cependant, ainsi que nous l’avons vu dans la parabole, il y a beaucoup de personnes qui n'entendent pas cet appel, soit refusent d’y répondre car ils n'y croient pas, ou bien encore ont autre chose à faire (l’un va à son champ, l'autre à son commerce nous dit Jésus). Cette parabole nous plonge vraiment dans le réel. Certains ne tiennent pas compte de l'appel car cela ne les intéresse pas. Cela peut aussi être notre cas dans notre existence : peut-être avons-nous eu un moment où nous n’avons pas écouté ce que le Seigneur nous disait, où nous n’avons pas entendu cet appel, où nous n’y avons pas prêté attention. Et puis, finalement à un moment donné de notre vie, nous finissons par répondre et par dire oui.

 

Nous sommes donc tous invités et cela à de grandes conséquences tant dans notre vie actuelle que dans notre vie future.

 

Cependant, ainsi que nous le voyons dans les passages d'Évangile, il nous faut en être digne. Que signifie « être digne » d'entrer dans le Royaume de Dieu ? C'est d'abord d'être capable de répondre à l'invitation de Jésus et d'y répondre par toute notre vie et pas seulement parce qu’il s’agit d’une tradition. J'ai bien lu les lettres que vous avez écrites et dans lesquelles vous demandez la Confirmation. Il apparait clairement que cette demande vient vraiment de vous, même si ce sont les parents ou les animateurs qui vous l’ont proposé. Il s’agit avant tout d’une démarche qui vous engage à mettre votre foi et votre confiance en Lui, mais aussi à marcher à la suite du Christ. Je voudrais prendre un exemple pour faire comprendre ce qu'est cet engagement à la suite du Christ. C'est l'image d'un trépied. Un trépied, s’il lui manque ne serait qu’un pied, il est branlant. Il est nécessaire que les trois pieds soient toujours ensemble pour que le trépied soit stable ! Ce trépied, c’est notre amitié avec le Christ, notre témoignage de foi et notre témoignage de vie. Les trois sont complémentaires.

 

D’abord, notre amitié avec le Christ, c'est Jésus qui le dit : « je ne vous appelle plus serviteur car le serviteur ne sait pas ce que veut faire son maître. Je vous appelle amis car tout ce que j'ai appris de mon père je vous l’ai fait connaître. » Nous pouvons donc être amis du Christ même si nous ne l’avons jamais vu (ce qui est notre cas et celui de tous les chrétiens) en méditant sa Parole d'abord, car lorsque nous la méditons, nous sommes transformés de l'intérieur et appelés à nous convertir ; en priant aussi ; en recevant les Sacrements et notamment celui de l’Eucharistie où Jésus se donne physiquement à nous par amour. Antoine de SAINT-EXUPERY disait dans Le Petit Prince « on ne voit bien qu'avec le cœur, l'essentiel est invisible pour les yeux ». Je crois que pour la foi, c'est exactement pareil, « l'essentiel est invisible pour les yeux ». Pourtant, nous avons des choses à voir et les sacrements se donnent à voir justement ! Donc, soyons des hommes et les femmes de prière ! Lorsque nous prenons le temps de prier, nous ne pouvons plus douter de notre amitié avec le Christ parce que nous faisons l'expérience de cette amitié, de cette relation avec le Seigneur, car l'amitié c'est d'abord une relation. Ne délaissons pas non plus les Sacrements et en particulier celui de l’Eucharistie ; le fait de venir à la messe est absolument essentiel parce que Dieu réalise en nous ce qu’Il signifie, c'est-à-dire que, vraiment, il se passe quelque chose qui nous dépasse, et dans l’Eucharistie en particulier, le Seigneur nous faire entrer dans sa vie divine, sa vie de ressuscité !

 

Ensuite, lorsque nous sommes amis du Christ, nous avons envie de le partager et de faire connaître l'Évangile, « parce que si quelqu'un a accueilli cet amour qui lui redonne le sens de la vie, comment peut-il retenir le désir de le communiquer aux autres ? [1]» c'est le pape François qui le dit. Et de fait, lorsque nous avons une très bonne nouvelle, quelque chose de formidable, nous voulons la partager avec tout le monde ! Cependant, il est vrai qu’il n'est pas facile aujourd'hui de témoigner de sa foi, puisque nous sommes confrontés à des incompréhensions, des moqueries, il faut se justifier, mais ce qui est important, je pense, c'est de saisir les occasions qui nous sont données et nous avons énormément d'occasions de témoigner de notre foi, en particulier lorsque des questions nous sont posées : pourquoi vas-tu à la messe ? Pourquoi es-tu confirmé ? Pourquoi vas-tu à l'aumônerie ? Pourquoi suis-tu la catéchèse ? Pourquoi fais-tu du scoutisme ? … il y a des tas de raisons qui font que, effectivement, nous avons à répondre. Et ce qui est avant tout important c'est de dire aux autres ce que ce que nous avons sur le cœur, en quoi la foi nous donne de l'espérance, de la joie, de la force dans les épreuves. Il nous faut donner un témoignage personnel en étant capables de dire « moi je », « je crois et pour moi c'est important ». Laissez parler l'amour de Dieu qui vous habite. C'est justement pour cela que vous recevez la Confirmation, un don de Dieu pour vous donner du souffle, pour vous donner du tonus, pour témoigner que croire en Jésus et le suivre change tout dans la vie !

 

Enfin, le troisième pied du tabouret, c’est de témoigner par notre vie, « aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés » dit Jésus. Cet amour du prochain, ce n’est pas seulement de l'affection pour son prochain. Soit dit en passant, nous n’avons pas toujours d’affection pour notre prochain. Il y a des gens que nous n’aimons guère car ils ne sont pas très aimables et ce ne sont pas forcément nos amis, mais Jésus dit bien qu'il faut aimer même ses ennemis, il faut prier pour ceux qui nous persécutent. Alors quand Jésus nous dit « aimez-vous les uns les autres », les incidences sont très grandes ! Cet amour du prochain passe par le service et par le don de soi. Le pape François vient de publier une nouvelle encyclique (c’est-à-dire une lettre pastorale et en même temps doctrinale qui rappelle quel est le cœur de notre foi) Fratellini Tutti (Tous Frères) dont la première phrase est : « Fratelli tutti écrivait Saint François d'assise en s'adressant à tous ses frères et sœur pour leur proposer un mode de vie au goût de l'Évangile » nous dit le pape François. « Leur proposer un mode de vie au goût de l'Évangile », c'est une très belle phrase ! Et bien justement, l'Esprit Saint vous est donné aujourd'hui pour vous donner l'inspiration, le désir, la force de vivre quotidiennement « au goût de l'Évangile », et que toute votre vie soit transformée « au goût de l'Évangile » ! Cela passe par arrêter de dire du mal de son prochain, de le critiquer voire de l’humilier sur les réseaux sociaux. Et essayer au contraire d'être un artisan de paix, de réconciliation entre les personnes, même si nous savons bien que c'est quelque chose de difficile. Quoiqu’il en soit, vous voyez bien que tout se tient, comme dans ce trépied, parce que, en effet, comment aimer le Christ et annoncer l'Évangile si nous ne sommes pas en union avec Lui par la prière, par les sacrements ? Comment en témoigner sans s’engager résolument à aimer son prochain ? Cela ne passera pas. Il n’est pas possible d’affirmer sa foi sans aimer son prochain. Tout se tient, et c'est ce que Jésus veut dire en parlant du « vêtement de noce ». Nous n’avons pas entendu le petit passage à la fin de l'Évangile, où cela ne se passe pas très bien puisque tous les invités de la noce sont présents, mais l’un d’entre eux ne porte pas le vêtement de noces. Il est donc jeté dans les ténèbres de dehors. Cela signifie qu'il n'avait pas vraiment cru, qu’il n'avait pas vraiment suivi Jésus, qu’il avait répondu à l'invitation mais qu’en fait sa vie n'avait pas du tout été transformée.

 

Alors, voilà un peu ce que nous allons célébrer dans le Sacrement de la Confirmation : c'est vital puisque c'est de notre vie dont il s'agit, c'est également la vie du monde aussi, la place que nous avons dans ce monde et le témoignage que nous y donnons. Ainsi, l’Esprit Saint va vous combler de ses dons pour vous aider à être fidèles en étant des témoins de l'amour du Christ dont notre monde a vraiment besoin aujourd'hui. Amen

 

 

 

† Laurent DOGNIN

Évêque de Quimper et Léon

 

 

 

[1] Evangelii Gaudium, n°8